L'expression a été introduite en France par George Eddy, commentateur sportif franco-américain pour Canal + et Eurosport, en commentant à la télévision les matchs de la NBA. Elle s’est étendue au tennis et au football. Souvent, on dit que les touches lors des derniers instants sont des poissons à ne pas louper. Le but même de la pêche est bien d’attraper le poisson au sens littéral. La capture d’un poisson est à la fois un aboutissement et un but en soi, ne serait-ce que pour les raisons éthiques du no-kill. D’un autre côté, il ne s’agit pas non plus de dire que la capture est obsessionnelle pour nous ! Loin de là ! On va souvent à la pêche sans attraper de poisson et on se contente du moment présent et du bien-être généré au bord de l’eau.
Dernières heures légales : le meilleur de la pêche du jour
Quand on a un départ, il est souhaitable que le poisson arrive sur le tapis. Le traumatisme de l’hameçon et du combat peut en partie être compensé par les soins mis en place par le pêcheur de carpe : tapis, produit cicatrisant, repos dans un sac, remise à l’eau soigneuse… C’est en croisant nos expériences que nous avons trouvé des points communs sur les touches liées au dernier moment. Et le cas le plus courant, c’est bien celui des plans d’eau soumis à une forte pression et qui ne sont pas en pêche de nuit. Les derniers instants de pêche légaux (soit trente minutes après le coucher du soleil) sont des moments clés à ne pas négliger. Bien souvent, on voit des pêcheurs arrivés très vite et ne pas prendre le temps d’observer et de bien mettre en place leur pêche. En arrivant sur ce genre d’eau, pour une pêche d’après-midi ou de soirée, et sans avoir amorcé en avance, nous prenons le temps de bien observer les lieux à la recherche des sauts, des zones calmes, des fouilles. Nos cannes, souvent une ou deux, sont quant à elles déjà eschées en avance. L’objectif est de pêcher pour un ou deux poissons en profitant de leurs habitudes.
Sur ces eaux, il n’est pas impossible de faire des touches en pleine journée en pratiquant des pêches alternatives : single, très longue distance, ultra-bordure… Mais bien souvent, on optimise le temps de pêche en pariant sur le money time, souvent ces 30 dernières minutes. Il faut donc s’appliquer au maximum, être sûr que tout sera pêchant au moment où ces dames décideront de s’alimenter… C’était en tout cas comme cela que se passaient les choses sur un plan d’eau de la région toulousaine. Ce lac d’une soixantaine d’hectares a été pendant longtemps en pêche de nuit. Peu à peu, les poissons ont connu une très belle croissance et sont devenus massifs. Pour de multiples raisons, ce lac n’a plus été en pêche de nuit. Il était toujours possible d’y faire de belles pêches en journée, du moins pendant quelque temps. Puis, c’est devenu l’exemple parfait du money time… Il fallait bien se poster et en quelques minutes on pouvait faire une très belle pêche. Laurent a largement expérimenté ce lieu et a très bien réussi dans le money time avec de très belles miroirs à la clé. Pour être opérationnel au moment clé, il faut être simple et rigoureux : une ou deux cannes, des appâts pêchant (type tiger nuts ou esche plastique en été), montage rigide et solide pour éviter les déconvenues. L’amorçage doit être précis et parcimonieux : c’est le genre de situation où l’usage des sticks et des sacs solubles prend tout son sens. Il faut bien placer ses montages et ne pas hésiter à relancer au moindre doute. Si vous êtes sûr de votre approche et que les touches tardent à venir malgré le temps qui file, il est parfois du meilleur effet de relever une canne et de relancer. Nous aimons beaucoup utiliser les esches équilibrées ou les bonshommes de neige.
Juste avant de partir : concentré jusqu'au bout !
Une autre dimension du money time réside dans les pêches rapides, de quelques heures au plus. Ce sont souvent des coups du soir ou du matin sur des zones de tenue et/ou d’alimentation qu’on peut régulièrement entretenir grâce à un amorçage à moyen ou long terme. Ces pêches éclair nécessitent un investissement important en temps, en appât et parfois en carburant. Là encore, il faut déterminer les habitudes des poissons et en profiter. Durant l’été 2023, Jef a réussi une série de coups du soir sur un mois et demi, à raison de deux coups du soir par semaine en amorçant en continu. Il connaît bien ce poste et ne l’avait pas pêché depuis quelques années. Les poissons y avaient gardé les mêmes habitudes et le fait d’amorcer très régulièrement à la même heure (vers 17 h-18 h) lui a visiblement permis d’augmenter le nombre de touches, jusqu’à trois touches entre 20 h et 21 h 15 ! Bien souvent, c’était la même canne qui démarrait et il fallait une bonne rigueur pour réussir à amener les poissons dans le filet et à relancer rapidement pour optimiser le money time. Comparativement, pêcher de nuit n’a pas rapporté plus de touches. Tout résidait dans l’amorçage rigoureux et dans la concentration au moment clé ! Laurent a fait le même constat en petite rivière, sur des coups amorcés sur quelques jours, où souvent il y avait de l’activité hors pêche durant la journée (canoës, baignades, chiens…). Les dernières minutes de la période diurne se sont avérées cruciales pour obtenir LA touche et le poisson qui sauve la pêche, quand tout redevenait enfin calme. Il lui est arrivé plusieurs fois d’avoir ce départ quand le matériel commençait à rejoindre la housse et souvent cela lui a rapporté gros ! Un autre critère est à prendre en compte : celui de l’heure des amorçages préalables. Notre expérience nous a permis de constater qu’amorcer le matin ou le midi permettait de déclencher les touches plus rapidement dans l’après-midi et d’espérer un poisson avant l’heure fatidique. A contrario, pré-amorcer plus tard en soirée pousse les poissons à s’alimenter plus tardivement et favorise les touches de dernières minutes.
En compétition : tuer le game !
Il s’agit ici des dernières heures lors de pêches en compétition. Il n’y a plus besoin de prouver l’extrême rigueur des compétiteurs, du début à la fin des compétitions. Ils savent très bien que le début et la fin d’un enduro sont des moments primordiaux. On ne compte plus les fois où la victoire s’est jouée sur le fil, avec quelques poissons attrapés dans les dernières heures, voire dans les dernières minutes (selon les règlements locaux, nationaux, voire internationaux, qui peuvent varier selon différents paramètres). Parfois, un poisson même de taille modeste peut faire basculer le classement. Il faut y croire jusqu’à la dernière minute! Il ne s’agit pas pour nous de glorifier la compétition en soi, mais d’insuffler soin et concentration dans le money time…
Les touches à ne pas louper... au début !
Dans le même esprit que le money time, il ne faut pas louper les poissons lors des premières pêches. Pour cela, il faut repérer une zone favorable et bien déterminer les spots de pêche. Une fois le poste repéré, il est temps d’investir sur le long terme. Il faut amorcer très régulièrement, surtout les deux ou trois premières semaines. Il est très important pour nous de ne pas pêcher au tout début de l’amorçage. On peut y aller franchement, avec des billes de différents diamètres, voire en couplant avec du maïs. On a coutume de mettre durant ces deux ou trois premières semaines entre 3 et 5 kg, au moins trois fois par semaine. Il faut être régulier et rigoureux et essayer de respecter des heures fixes. Les rivières que nous pratiquons sont de deux types : des « petites » et des fleuves. Pour les « petites », la largeur est de 15 à 30 mètres, avec peu de courant. Très souvent, les gros poissons tombent dès la première pêche. Cela a été vrai pour Jef dans le département du Gers. En faisant ainsi, il a pris deux fois le même poisson à plusieurs années d’intervalles. Non seulement ce poisson avait grossi (+2 kg en 3 ans), mais il a été pris les deux fois dans les premières heures de pêche (sans jamais être repris ensuite la même année) après une bonne période d’amorçage. C’était bien le départ à ne pas louper! Comment tenter d’expliquer cela? Nous pensons que le fait d’amorcer assez longtemps et très régulièrement met les poissons en grande confiance. En n’amorçant pas n’importe où, mais bien sur des zones a priori favorables, au bout de quelque temps (disons au moins 10 jours) les carpes basculent sur cette nourriture exogène. Il faut ce temps pour que les carpes soient d‘abord séduites et fréquentent ensuite assidûment la table. On crée ainsi les conditions favorables pour que les plus gros sujets (qui doivent manger en quantité et plus régulièrement) fréquentent très souvent la zone en question. Au bout de deux mois et à l’issue de quelques pêches, il est tout à fait possible de continuer à alimenter le poste avec tous les restes des autres pêches que vous faites durant l’année (graines, pellets, différentes sortes de billes). En effet, nous pensons qu’en petite rivière, après un couple de mois, la cohérence de l’amorçage est moins importante qu’au début.