Brochet, sandre, perche, black-bass… Dans un rayon de 30 km autour de chez lui, Christophe Decours, notre « mousquetaire du leurre » n’a que l’embarras du choix. Ce fils de vigneron, devenu aujourd’hui un œnologue patenté, détient ce précieux sésame qui lui ouvre l’accès à une dizaine de petits lacs collinaires, véritables oasis dans un département gorgé de soleil : le Gers.
Un sacré terrain de jeu
Sa réputation de pêcheur « sportif » aidant, il a su tisser un réseau d’amitié et de confiance qui lui permet d’accéder à de nombreux lacs. Il faudrait plutôt parler d’étangs, dont certains sont très anciens, nichés au cœur de vallons. Tous offrent un caractère sauvage, avec des profils variés, les profondeurs moyennes s’échelonnant de 1 à 5 m. Mais pourquoi recèlent-ils de telles populations piscicoles – black-bass et perches en tête – alors que leur fonction première est d’irriguer la vigne et les cultures fruitières qui s’étendent à perte de vue ? C’est au lendemain de la Seconde Guerre mondiale que se trouve l’explication. Afin de contrer le développement des populations d’écrevisses qui, en creusant des galeries fragilisent les digues en terre, l’implantation de black-bass s’avéra une solution efficace. Le biotope particulièrement riche – température d’eau moyenne, bois mort, végétation rivulaire, plages en pente douce – ne pouvait pas mieux convenir à cette espèce prolifique dont on sait les qualités d’adaptation ! Mais au fil de ses prospections, Christophe ne fut pas au bout de ses surprises en découvrant, dans certains lacs, de belles populations de perches et, plus récemment, de sandres et brochets sans que personne ne sache très bien comment ils sont arrivés là. « Par la volonté de saint Pierre », s’amuse Christophe, qui a déjà chargé son matériel dans son 4x4. Avec son dynamisme et cet optimisme qui ne le quittent jamais, il me propose de nous rendre sur un de ses secteurs à perche où, la semaine passée, les belles zébrées opéraient des coupes réglées dans les bancs d’alevins. Les pêches de surface, à l’aide de petits poppers et sliders, s’étaient montrées particulièrement efficaces avec des spécimens avoisinant les 45 cm !
Place à l’action
Ce matin, malgré une baisse sensible de la température, la confiance de Christophe est au beau fixe. Float-tube gonflé, matériel monté, boîtes triées, montages finalisés, notre ancien compétiteur – deux fois vainqueurs du National Bass – n’a rien perdu de ses réflexes. Son leitmotiv : simplicité et efficacité. Voilà qu’il palme déjà le long d’une bordure afin de rejoindre un haut-fond suivi d’une cassure. Une brise orientée nord-est s’est levée, et le ciel s’est voilé. Les premiers lancers sont accompagnés d’une petite pluie fine. Pas une chasse en vue, pas la moindre activité de poisson fourrage ! Exit, par conséquent, les leurres de surface. Christophe passe en mode prospection rapide et peigne consciencieusement les couches d’eau intermédiaires à l’aide d’un petit leurre métallique à palette particulièrement dense malgré sa taille réduite (2,6 cm pour 10 g). Animation linéaire, verticale aucune touche. Au lipless et au crank non plus. Passage au Nitro Shad de 6 cm, coloris « nacré » (une valeur sûre) monté en carolina sur hameçon texan dans le but de gratter le fond au niveau de la digue, rien n’y fait. « Et dire qu’il y a encore trois jours, les belles zébrées chassaient goulûment et montaient sur de petits poppers », fait remarquer Christophe, toujours aussi enthousiaste. Le propre d’un compétiteur n’est-il pas de s’adapter et de ne rien lâcher ? Faute de pouvoir s’arracher les derniers cheveux qui lui restent sur la tête, Christophe change à nouveau de scénario. Il opte pour un petit jig noir équipé d’un trailer suggérant une écrevisse. Quelques lancers en mode « skipping », parfaitement ajustés sous les frondaisons, animation minimaliste et c’est une touche du bout des lèvres. Ferrage ajusté après avoir légèrement rendu la main. Pan ! Les perches sont bien là, descendues dans 2,50 m, nichées au plus creux des branchages.
Un bref premier coup de folie
Christophe enchaîne plusieurs zébrées affichant de jolies formes et une robe parfaite. Ah ! Qu’elles sont racées ces gersoises ! Le coup de feu est cependant de courte durée. Il insiste, dans l’espoir de prendre une toute grosse, multipliant les changements de leurre, de taille, de forme, de couleur. « Pourtant, il y a encore trois jours… » marmonne-t-il. C’est au tour d’un joli black-bass de s’inviter cette fois sur son Nitro Shad de 6 cm. Ces deux heures de pêche se solderont par une dizaine de belles perches, certaines grosses comme un ballon de rugby, quoi de plus normal en ce pays d’ovalie !
Une portière claque. C’est Maeva, la jolie fiancée de Christophe, qui nous rejoint comme prévu pour la pause pique-nique. Elle a pris goût à la pêche il y a deux ans. Formée à bonne école, elle s’avère une sérieuse concurrente, aussi à l’aise à skipper qu’à gratter ou envoyer au diable Vauvert un gros swimbait. Son plus gros bass à ce jour, un spécimen de 55 cm. Pour nous résumer, Maeva est à l’armagnac ce que Christophe est à la Maison Jaboulet (les connaisseurs apprécieront !). Tous deux ont fait de leur métier une passion et aiment à partager leur temps de loisir sur l’eau, quand ce n’est pas à moto ! La pause roborative terminée, Christophe décide de changer de lac pour nous faire découvrir un autre spot secret, estampillé « spécial bass ». Seulement un quart d’heure de voiture et nous voilà arrivés sur site. Un somptueux lac collinaire, d’une dizaine d’hectares, présente un profil en longueur.
En prenant tout le monde de vitesse, Maeva, ni une ni deux, enfile ses waders et gonfle son float-tube. Elle traverse sans coup férir le lac pour aborder la berge la plus encombrée. Deux lancers plus tard, sa canne se courbe. Sans finasser, elle extirpe des bois noyés une jolie perche qui arbore un jig ! Christophe ne cache pas son admiration. Quelques coups de palmes, et elle pose pour la photo de famille. Un check et le « duel » est lancé. Une petite battle amicale, rien de tel pour se taquiner !
Un pattern décisif
Si Maeva continue sur la bordure avec succès, Christophe tente la pleine eau afin de l’emporter au poids. Il sait que de gros bass affectionnent la rupture de pente où des bois noyés sont enchevêtrés. Swims durs ou souples, leur taille, entre 16 et 18 cm, ne laisse aucun doute sur les intentions de notre mousquetaire ! Mais au bout d’une heure de prospection assidue, Christophe se rapproche de la bordure où Maeva creuse tranquillement l’écart en points ! Jig noir trailer écrevisse : c’est décidément le pattern du jour ! Le temps se couvre. Après une remontée contre le vent qui a forci, Christophe s’enfonce dans la « mangrove ». En tête du lac, peu profond, de nombreux canaux se ramifient entre des îlots de végétation. Le float-tube fait merveille pour soigner sa discrétion. Changement de combo, plus puissant, un 35/100 ne sera pas de trop pour extirper les bass de ce dédale végétal. Tiens donc, il opte pour un jig noir équipé d’un trailer ! L’action de pêche consiste à envoyer le leurre au plus profond des arbres immergés, à le laisser descendre, bannière semi-tendue, jusqu’à prendre contact avec le fond. Quelques animations en saccade, et le jig est récupéré à toute vitesse avant d’être déposé à nouveau dans des fenêtres de tir très étroites. Une action de pêche passionnante qui requiert précision et sang-froid. Au moindre déplacement de la bannière ou perception d’un toc, le ferrage doit être puissant. Christophe enclenche ensuite la marche arrière en rétropédalant, frein serré afin d’extirper le bass qui multiplie les cabrioles. À ce petit jeu, notre régional de l’étape est passé maître. Il enchaîne plusieurs spécimens entre 45 et 50 cm. L’affaire est quasi dans le sac, mais c’est sans compter sur Maeva, qui est aussi dotée d’un solide mental. Mais que fait-elle cette fois en pleine eau, là où Christophe s’était attardé sur la rupture de pente ? La réponse est simple quand elle présente, avec un léger rictus, un bass de 53 cm qui a craqué pour un Dunkle de 15 cm. Ce sera le mot de la fin !
LES BOÎTES A LEURRES DE CHRISTOPHE ET MAEVA
■ Chan Wake 13 cm, colors HL visibleperch
■ TN Slim 8 cm, coloris Clear Bleack
■ Nitro shad 6,5, 9 et 12 cm
■ Deraball, 8,2 cm, 26 g
■ Dexter Shad, 9 cm
■ Mushbob 50 MR, 5 cm,
■ Deracoup, 2,8 cm, 10 g, Hi Perch
■ Flick Shake, 16,5 cm, High Appeal Watermelon
■ Craw feature Fivoss 3’8 Black
■ Magic ring curly worm 4 et 6’’
■ Jig Football Head Type, 10 g et 14 g, black - trailers Scissor comb Illex et chunk craw Jackall
■ Spinnerbait, Crusher, 35 g, gold carp
■ Illex Gantarel 16 cm
■ Illex Freddy 170
■ Rerange 130 sp
■ Dunkle 15 et 18 cm