J'ai découvert la traque du sandre du bord il y a une vingtaine d’années. Je fus initié par un ami à une approche qui était peu connue à l’époque, au leurre souple. L’hiver battait son plein et la Seine était en crue. L’eau marron charriait des branches ! Impossible d’imaginer pour moi à ce moment-là que cela constituait les conditions idéales pour traquer le sandre du bord. Après des années de pratique rien n’a changé et je ne rate jamais une occasion d’aller chercher le sandre lorsqu’une montée d’eau s’annonce.
Montée des eaux
De manière générale, le simple fait que la rivière se teinte sera bénéfique pour la pêche de ce percidé. Au début de la crue, on observe dans un premier temps une augmentation de la turbidité. L’eau se trouble progressivement. Cette première étape peut déjà être exploitée car on constate, sui vant les secteurs, une augmentation significative de l’activité des sandres à ce moment-là. Ce poisson et particulièrement les gros spécimens, exercent l’essentiel de leur prédation la nuit. Le fait que l’eau se teinte pendant une crue permet probablement de recréer des conditions de chasse propices, même en pleine journée. Ceci explique sans doute ce regain d’activité dès le début de ce type d’épisode.
Tous au bord
Lorsque les précipitations continuent, le courant du fleuve augmente peu à peu. Ceci a pour conséquence de chasser le poisson fourrage sur les bordures et dans les secteurs abrités du courant puissant du chenal. Le sandre suit le fourrage et trouve des zones de repli pour s’abriter et profite du rassemblement des poissons blancs pour se nourrir. C’est là que les conditions deviennent idéales pour une approche du bord. En effet toute l’action de prédation se concentre dans les zones de calmes et les contre-courants qui sont le plus souvent créés par les décrochages de la berge et donc en bordure. Toutes les zones abritées du courant peuvent alors être intéressantes. Les grands classiques sont les entrées de ports, de darses ou de ballastière, les décrochements de berges créant des zones de remous, l’aval des îles et des piles de ponts ou encore dans certains cas l’aval des grosses péniches amarrées.
Porté par l'eau
Une fois les postes repérés, il faut peigner méticuleusement ces secteurs un à un et à différentes heures de la journée pour tomber sur un « passage » ou un pic d’activité. Une pêche lente aux leurres souples est alors souvent la plus appropriée. Le jeu consiste à lancer un leurre souple lesté le moins possible dans les veines de courant, dans les remous et les zones plus calmes. Le montage doit couler lentement en dérivant dans les veines d’eau jusqu’au fond. Si le montage est parfaitement plombé la bannière décrit alors un arc de cercle et on ne sent pas beaucoup le leurre équipé du lest. Il faut alors compléter les informations sensitives par les visuelles concernant l’évolution de la bannière, un peu comme à la pêche au toc en quelque sorte. Pour savoir si le montage arrive au fond, il suffit de surveiller le moment où la bannière se détend subitement. Profitons-en !
Le plus léger possible
Bien sûr cette technique demande une certaine pratique, mais avec le temps on peut diminuer petit à petit la masse de la plombée et c’est souvent la clef du succès. C’est l’effet planant du leurre, comme en suspension, qui incite le sandre à passer à l’attaque. Le vent, la force du courant, le diamètre de la tresse jouent des rôles importants pour définir la bonne plombée ! À titre d’exemple, une plombée de quatre grammes associée à une tresse de 0,13 mm permet de pêcher dans six mètres d’eau avec un shad de 10 cm si le courant est relativement moyen et que le vent est faible. Pour cette technique et afin de démultiplier le retour d’informations, j’utilise des cannes spinning extra fast, très légères et résonnantes comme le modèle Illex Pepper X5 S 215 ML-M Finesse Puppeteer en 4-10 g, associée à des moulinets haut de gamme très légers. Ces ensembles permettent de se concentrer au maximum sur les informations que renvoie le montage et de le contrôler pendant des heures avec précision et sans fatiguer. On travaille alors essentiellement sur l’inclinaison de la canne qui joue sur la tension de la bannière et permet de contrôler les évolutions du montage.
La bonne animation
Les lancers sont effectués vers l’aval (voir croquis). Si vous pêchez vers l’amont le montage est ramené par le courant en direction du pêcheur, ce qui limite l’effet planant du montage et augmente énormément les risques d’accrochages au fond. Une fois le lancer effectué, fermez le pick-up et laissez le montage couler lentement au fond en surveillant le moment où la bannière se détend. Attention les touches peuvent arriver dès la première descente ! Pour l’animation, dans bien des cas, contentez-vous de deux ou trois tours de manivelle du moulinet ce qui fait décoller le montage de 20 à 30 centimètres au-dessus du fond. Attendez ensuite que le montage retourne lentement au fond. La touche survient souvent dans cette phase de descente. C’est une pêche en linéaire, assez lente et insistante où la légèreté du montage oblige à pratiquer des pauses pour reprendre contact avec le fond très régulièrement. La violence des touches est toujours incroyable ! Les sandres affamés donnent de violents coups de tête dès le début du combat. Un plaisir pour le passionné. La pêche du bord est une technique simple, nécessitant très peu de matériel et qui malgré cela est redoutable d’efficacité à certains moments de l’année.
Heavy drop-shot
Le montage est réalisé de manière à permettre l’évolution d’un leurre souple sans lest en plein courant ou encore dans des zones de très gros remous. Le drop shot permet de présenter un leurre souple non lesté qui aura une évolution très naturelle. Dans les forts courants, les sandres se postent souvent à la limite de la veine principale. Les fonds y sont souvent tourmentés et une présentation classique entraîne de nombreux accrochages. Je règle mon drop shot de manière à évoluer 20 à 40 cm au-dessus du fond, je limite les déplacements, une fois arrivé au fond, je laisse le leurre évoluer seul dans le courant sans déplacer la plombée durant cinq à dix secondes avant de le déplacer avec deux ou trois tours de manivelle. Pour garantir l’attractivité du montage, il est impératif d’utiliser des leurres très mobiles qui évoluent seuls dans le courant. Le Magic Swing Tail d’Illex avec sa queue articulée génère de fines vibrations
Le choix des leurres
Pour cette technique j’utilise plusieurs leurres souples suivant les circonstances. Aux heures extrêmes de la journée, j’opte pour des modèles qui vibrent beaucoup. Je choisis des shads à larges caudales comme le Dexter Shad 150 (1) d’Illex en fluo jaune ou sombres voire noirs. Par faible luminosité, ces teintes sont efficaces sur le sandre. Le reste du temps, j’essaye plusieurs coloris et types de vibrations pour trouver la combinaison la plus efficace du jour. J’utilise essentiellement des shads de 10 à 15 cm comme le Magic Slim Shad d’Illex (2), le G-Bump (3) ou le V3IB (4) de Gunki qui a des vibrations plus fines. En plein jour les couleurs flashy ont ma préférence, mais je n’hésite pas à utiliser des couleurs naturelles même dans une eau très teintée.